La tradition des loques

La région Nord et Pas-de-Calais ainsi que la Belgique proche, témoignent encore aujourd’hui d’une pratique ancienne : la tradition des loques. Une tradition qui consiste à accrocher des loques, linges ou objets, à un arbre, un calvaire ou la grille d’une chapelle réputée miraculeuse. Ce geste, souvent accompagné de prières, noue, lie au sens propre du terme le vœu ou la demande de guérison au saint ou à la Vierge invoquée. La chute de la loque est alors le signe d’être exhaussé.


Les chapelles, fontaines, calvaires et arbres à loques

On trouve ainsi des vêtements, pansements, bijoux, jouets, rubans, objets personnels, photos… accrochés à la grille, sur les murs voire à un arbre voisin comme à la chapelle du Dieu Gibloux à HASNON, dans le département du Nord (59) ou au calvaire de Steene. Certains cultes sont « spécialisés » par exemple pour la marche, la motricité de l’enfant. On découvre ainsi des dizaines de chaussons de bébés, petites chaussures et mini chaussettes attachés ou déposés. C’est le cas par exemple à Wignehies dans l’Avesnois, sur le tombeau de saint Erkembode dans la cathédrale de Saint-Omer ou encore la fontaine Saint-Martin de Morcamps. A l’inverse moins curatifs que votifs, certains lieux sont propices à la réussite d’un examen, la crainte d’une perte d’emploi, la guérison d’une phobie comme c’est le cas pour ND de Toutes – Les – Peurs à Boeschepe (59).
À souligner la parenté étroite qui existe avec les arbres à clous, également présents dans notre région. Le clou planté dans le tronc, avec ou sans une loque, entre dans la même logique. Garder, fixer le mal, noué ou cloué, il l’éloigne du malade. Ces arbres, souvent des chênes ou des tilleuls, sont d’ailleurs pour la plupart christianisés et liés au culte d’un saint : saint-Antoine à Herchies, saint Claude à Sénarpont dans l’Oise. La force de la tradition est d’ailleurs si forte qu’elle perdure même lorsque l’arbre meurt, se déplaçant ainsi sur un arbre plus jeune ou replanté. Enfin, on constate quelquefois une double croyance avec la présence à proximité d’une source réputée elle aussi miraculeuse. C’est le cas par exemple de la fontaine Saint-Martin et le tilleul à loques de Wulverdinghe.


La tradition des loques, l’espoir d’une guérison miraculeuse

L’objet laissé sert donc à la fois de messager, de médiateur et de « fixateur » de la maladie invoquée. Il représente à la fois la maladie et le malade, le mal et l’espoir. Le don dans ce qu’il prend et il transmet. Plusieurs rituels peuvent être associés en laissant la loque. Une prière au saint invoqué, un cierge allumé, un nombre de tours à faire autour de l’arbre ou de la chapelle comme c’est le cas pour la chapelle de la Passion au Mont-des-Cats. Enfin, pour les loques accrochées en extérieur, la croyance veut que celles qui se détachent d’elles-mêmes sont signe de guérison. Raison pour laquelle on n’enlève jamais un linge, un objet pour y placer le sien. Dans certains endroits, en réalité, on enlève régulièrement les loques. Les objets quant à eux sont souvent réunis et placés à l’intérieur de la chapelle.
Certaines sont aujourd’hui tombées en désuétude. C’est le cas la chapelle à Loques de St Gangoen à Outtersteene, près de Bailleul, dans le Nord. D’autres, en revanche, font toujours l’objet d’un culte encore très présent. Au fil des semaines, Nord Découverte vous fera visiter ces lieux chargés d’histoire. Des endroits qui, au-delà de la dévotion elle-même, sont souvent l’occasion de découvrir des endroits insolites et plein de charme.

Sources : Par Isabelle Duvivier  https://nord-decouverte.fr/la-tradition-des-loques/